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Suite à un article d’une feuille paroissiale transmise par un ami, j’ai envie de vous partager, chers soeurs et frères chrétiens, le contenu de ce message intitulé « Aimez vos prêtres » et l’échange de mails à qui il a donné lieu. Peut-être ce témoignage vous paraîtra-t-il difficile à croire ou exagéré, pourtant c’est une réalité qui ne doit pas (plus) être cachée aujourd’hui. Puisse-t-il aider nos frères prêtres à trouver autour d’eux le soutien dont ils ont besoin de la part de ceux qui leurs sont confiés.
De : Luc
Envoyé : samedi 6 juillet 2024 11 h 18
Objet : « Aimez vos prêtres »
AIMEZ VOS PRÊTRES
D’après des études récentes… Un grand nombre de prêtres quittent chaque année.
Ils n’abandonnent pas parce qu’ils manquent de foi en Dieu. Ils n’abandonnent pas parce qu’ils ne croient pas à l’appel que Dieu a placé sur leur vie. La plupart n’abandonnent même pas pour des raisons financières ou parce qu’ils ont rencontré l’ « âme soeur ».
Les prêtres démissionnent parce qu’ils sont submergés par l’épuisement mental.
Jusqu’à ce que vous soyez prêtre, vous ne comprendrez jamais pleinement ce que c’est de porter des fardeaux spirituels pour les gens. Se lever au milieu de la nuit, prier pour sa famille de foi. Réveillé au milieu de la nuit avec quelqu’un sur le cœur. Dépassé par l’inquiétude d’une personne absente ou distance.
Votre esprit est continuellement occupé par la présentation du prochain message du dimanche : comment le prêcher, quoi enseigner, comment l’appliquer ? Se faire critiquer sans cesse.
Se faire dire qu’il faut faire mieux ou que certaines parties de l’Eglise ont simplement besoin d’être meilleures.
Les prêtres investissent toute leur vie dans les gens et pourtant les gens tourneront le dos à leur pasteur au premier signe d’une tempête, généralement sans conversation. Les prêtres se tiennent au milieu des disputes. Les prêtres se tiennent au milieu des commérages. Les prêtres consolent ceux qui ont subi la perte. Les prêtres naviguent dans les eaux des gens imparfaits avec le désir de voir chacun s’épanouir dans sa foi.
Ils aspirent à des percées spirituelles. Votre prêtre a besoin de ce qu’il y a de mieux pour vous. Tout cela, tout en essayant de combattre leur propre chair et de grandir dans leur propre relation avec Dieu.
Les prêtres voient les messages.
Les prêtres entendent les murmures.
Les prêtres endurent la négativité.
Les prêtres prennent continuellement soin des moutons tout en repoussant les loups.
Le prêtre donne ce qu’il est, ce qu’il a, verse et verse encore – rarement versé dedans lui.
Qu’est-ce qui fait tenir un prêtre ? TOI !
Toi – la personne qui a vraiment faim.
Toi – la personne qui vénère avec passion et liberté.
Toi – l’adolescent qui s’efforce d’être un disciple de Jésus.
Toi – la maman célibataire qui comprend la beauté de l’espoir trouvé en Christ.
Toi – celui qui passe la porte pour la première fois parce que tu es à la recherche de la paix, de l’espoir et de la communauté.
Priez pour votre prêtre. Servez avec votre prêtre. Parle avec ton prêtre. Encourage ton prêtre.
Ils sont humains. Ils ont plus besoin de toi que tu ne le penses !
Hervé Gottrant, diacre permanent, le 26 mai 2024
RE: « Aimez vos prêtres »
De : Bernard Pönsgen À :Luc
Envoyé : Lun 08-07-24 09 h 47
Cher frère Luc ! J’espère que tu vas bien et que ta santé est stable désormais. Merci pour ton courriel et la feuille paroissiale avec la méditation « aimez vos prêtres ». Au moins, on peut être sûr que l’expéditeur de ce message les aime, lui ! 😇
J’en avais eu connaissance par un paroissien d'[…] que ce texte avait interpellé… et qu’il ne comprenait pas très bien : « Comment ? Les prêtres ont tant de problèmes et sont épuisés ? Bizarre… »
Tu as eu raison de mettre le doigt dessus : Moi-même j’ai dû prendre du recul, tu le sais sans doute, en demandant voici 6 mois une mission moins écrasante pour mon système nerveux, il en allait de ma survie. Actuellement, je remonte tout doucement la pente et je suis heureux dans mon ministère d’aumônier d’hôpital… Il était temps !
Sûr que les paroissiens lambdas ne se rendent pas compte ; pourtant, ils font partie du problème ! Entre ceux qui suivent innocemment en « consommateurs » et qu’il faut chouchouter en acceptant toutes leurs exigences (car ils ne comprennent pas nos limites humaines et fonctionnelles), et ceux qui ont pris le pouvoir et jouent au « petit chef » en bloquant les aspirations des autres et en tirant à boulets rouges sur tout ce qui ne leur convient pas : oui, pas évident d’être prêtre – curé surtout – dans ce contexte.
D’autant que la hiérarchie ne se mouille généralement pas dans ces conflits, ou nous complique encore la vie en relevant sans cesse le niveau d’exigences « managériales » des petits soldats que nous sommes, nous les prêtres de base, alors que le ‘front’ recule de de plus en plus comme en Ukraine. On gère une forme d’Eglise d’un autre âge, dont les structures s’effondrent chaque jour davantage, en colmatant tant bien que mal des brèches qui s’élargissent sans fin. Le temps et les énergies manquent pour inventer de nouvelles manières de faire Eglise et de vivre l’Evangile. On est coincé dans un système dont la plupart des gens ne désirent pas changer… Un Eglise procéduriale, juridiste, fonctionnelle qui se dispute les restes et les oripeaux du pouvoir.
Qui voudrait dans ces conditions aller au casse-pipes ? La chute verticale des vocations n’étonne plus que ceux qui vivent dans un autre monde…
S’il n’y avait la prière… « C’est lorsque je suis faible que je suis fort », proclamait Paul dans la lecture de dimanche. Oui, sans la grâce, impossible de tenir. Et il est vrai que Sa puissance donne toute sa mesure dans notre faiblesse, je l’ai souvent expérimenté. Mais pour que nous nous sentions bien dans notre ministère, nous avons besoin que notre soif de Dieu rencontre une autre soif, celle de passionnés (comme toi!). Malheureusement, c’est devenu trop rare.
J’écris ceci pour que tu portes dans ta prière un frère prêtre qui se sent bien seul dans son ministère pastoral (11 communautés!), et qui a écrit il y a quelques semaines une lettre à ses paroissiens en forme d’ « au secours » ; il est déjà quasi en burnout, et il fait appel à ce que des laïcs de bonne volonté viennent partager avec lui la charge pastorale. Je le soutiens aussi comme je peux, en le soulageant de célébrations que je puis désormais assurer pour lui, grâce à ma nouvelle disponibilité ; mais le vrai problème est que nous avons rarement des équipes pastorales qui s’engagent pleinement autour du curé en co-responsabilité et travaillent en communion spirituelle et fraternelle à la tâche de pasteur (j’avais quand même réussi à en monter une dans cet esprit-là, à Dison – sinon, je crois que j’aurais craqué bien plus tôt).
Mon frère prêtre, lui, ne dispose pas de ce genre d’équipe, car les paroissiens même engagés n’en ressentent sans doute pas la nécessité. Et puis, il faut dire que la moyenne d’âge des laïcs responsables comme celle des simples paroissiens, est de plus en plus importante : Cela ne favorise pas un dynamisme de vie chrétienne, d’évangélisation…! Tout comme l’esprit de clocher ou de repli sur soi et sur ses prérogatives jalousement gardées dans un contexte de raréfaction des moyens : chaque communauté, groupe, souvent, essaye de tirer la couverture (qui se rétrécit) à soi, et ça génère des tensions, des conflits… Au lieu de construire l’avenir, on se cramponne sur les restes d’un passé.
Je sais que tu sais tout cela, ou en tout cas que tu t’en doutes bien. En « haut lieu », c’est rarement abordé de cette manière. On essaye juste de former davantage les prêtres restants et les acteurs pastoraux laïcs ou ordonnés pour qu’ils puissent « gérer » l’effondrement en gardant des possibilités d’évolution vers un avenir incertain. Mais est-ce qu’on compte assez sur l’Esprit-Saint ? Pour moi, tout le diocèse dans son ensemble autour de son évêque devrait avant toute chose entrer dans une grande retraite spirituelle d’une année au moins, une refondation dans la prière… comme Jésus lors de ses 40 jours au désert !
En tout cas, on est à la veille de grands craquements, comme ces icebergs qui se détachent de la banquise… Il faut se préparer, et préparer les croyants. Cela a déjà commencé, comme le réchauffement climatique. Après l’exil à Babylone, le Petit Reste d’Israël sauvera la Foi en devenant ce peuple pauvre et humilié « qui pratique ce qui est droit, aime la miséricorde et marche humblement derrière son Dieu » (Michée 6,8). Sans doute nous faudra-t-il passer par là. Une purification.
Merci de ta prière pour nous tous les prêtres, pour mon ami en particulier. Heureux de ton amitié, je prie le Seigneur de te bénir, toi et les tiens, et tous les chrétiens de ta communauté que tu sers avec dévouement. 🙏
Et que la Joie du Seigneur soit notre rempart ! (devise de l’ancien évêque A. Jousten)
Fraternellement, en communion,
Bernard
